
La littérature japonaise m’apporte ces derniers temps le réconfort et la douceur dont j’ai besoin. J’ai choisi des livres courts pour m’habituer à cette littérature si particulière dans laquelle je me sens encore complètement paumée. Les noms de villes ou de personnages me semblent encore difficiles à retenir, mais je dois dire qu’entre deux pavés j’apprécie de lover mon esprit confortablement dans les pages de ces romans sans haine ni violence, et à l’esthétique si particulière.
J’ai décidé d’inclure, dans chacune de mes chroniques, une ou deux citations marquantes. J’en relève toujours, dans chaque roman que je lis, et je me dis que ça serait bien d’en garder une trace quelque part…
Je vous parle aujourd’hui de La librairie Morisaki, de Satoshi Yagisawa, publié chez Hauteville.
L’histoire (4ème de couverture)
Les jours passés à la librairie Morisaki resteront à jamais gravés dans ma mémoire. Puisque c’est là-bas que j’ai commencé à vivre, à vivre réellement. Sans cette parenthèse, ma vie aurait été bien moins colorée, bien plus monotone, bien plus triste. Un lieu précieux, inoubliable. Voilà ce qu’est la librairie Morisaki à mes yeux.
Takako a le coeur brisé lorsque Hideaki, l’homme qu’elle aime, lui annonce ses fiançailles. Dévastée, la jeune femme ne supporte plus de le croiser au travail et démissionne. Takako a bien du mal à remonter la pente… jusqu’au jour où elle reçoit un coup de téléphone de son oncle Satoru, qu’elle n’a pas revu depuis de nombreuses années. L’homme, un peu excentrique, est à la tête d’une vieille librairie d’occasion, implantée à Jinbôchô, le quartier des bouquinistes à Tokyo. Il lui propose de venir l’aider, et même de s’installer au premier étage de la boutique. Voyant enfin l’avenir lui sourire, Takako accepte et découvre parmi tous ces livres un nouveau langage qui lui était jusque-là inconnu…
Un livre réconfortant
Il y a des livres qui ne bouleversent pas par leurs intrigues haletantes, mais par leur douceur, leur pudeur, et leur capacité à nous faire du bien. La librairie Morisaki – Satoshi Yagisawa de Satoshi Yagisawa est de ceux-là. Ce court roman est une véritable déclaration d’amour aux livres et à ceux qui les lisent, et il offre une parenthèse bienvenue dans le tumulte de la vie. À travers ses pages, l’auteur nous invite à explorer les trésors cachés de la littérature, à redécouvrir la magie des histoires qui nous réchauffent le cœur et apaisent l’esprit.
L’histoire débute sur une rupture : Takako, jeune femme d’une trentaine d’année qui vit dans la capitale japonaise, voit sa vie basculer du jour au lendemain lorsque son petit ami (et collègue de bureau) lui annonce ses fiançailles… Avec une autre ! C’est un coup de massue pour elle qui n’a rien vu venir. Sa vie personnelle, mais aussi professionnelle, vole alors en éclat. Abattue, incapable de retourner travailler, elle sombre dans une forme de petite dépression. Qui lui jetterait la pierre vu ce qu’elle traverse ? Son oncle, informé de ses peines de cœur, l’invite alors à passer quelques temps chez lui, dans son magasin un peu défraîchi du quartier des bouquinistes de Tokyo.
Takako accepte sans grand enthousiasme, mais elle y voit l’avantage de pouvoir se loger sans débourser le moindre centime alors qu’elle a perdu son emploi. Après un petit temps d’adaptation, cet endroit modeste va devenir son refuge, son cocon. On imaginerait presque cette minuscule chambre envahie par les vieux ouvrages au-dessus de la librairie, on sentirait presque l’odeur des livres anciens et la chaleur qui émane de cette bulle dans laquelle elle a trouvé refuge. Ce que Takako a trouvé ici, c’est un endroit où elle pourra panser ses blessures et faire une pause dans sa vie avant d’en entamer un nouveau chapitre. A l’écart de la grande ville, le quartier s’apparente plus à un village qu’à un quartier de la capitale japonaise. Il sera au centre du roman, prenant vie sous nos yeux tel un personnage réel. Les ruelles pavées entourées de vitrines poussiéreuses où s’entassent des piles des bouquins se matérialisent sous nos yeux, les petits cafés calmes où les lecteurs se délectent d’un bon roman avec une tasse fumante pour leur tenir compagnie nous appellent à y entrer pour un instant de détente.
Les personnages sont d’une justesse parfaite. Ils pourraient être vous ou moi, ils ont une vie simple et sans fioriture, ils sont faits de forces et faiblesses, ils sont confrontés aux mêmes moments difficiles que nous. N’importe quel lecteur pourra s’identifier à eux, ils ne sont pas des superhéros, ils ne vivent rien d’extraordinaire et c’est ce qui rend cet ouvrage si singulier.
Des thèmes forts
Ce roman est celui de la rupture, du deuil mais aussi celui de la renaissance. Il touchera inévitablement les lecteurs qui ont déjà été confrontés à ces peines de l’âme. Il y a une certaine mélancolie qui transparaît de ces pages mais ce qui fait la force de La Bibliothèque Morisaki, c’est sa capacité à montrer qu’il est possible de renaître de ses cendres, sans grand éclat et sans faire de vagues, juste grâce au temps qui passe et à quelques personnes présentes à nos côtés.
On n’exprime pas ses sentiments au Japon comme on le ferait dans les pays méditerranéens et il y a une grande délicatesse chez les auteurs japonais qui traitent avec pudeur et douceur des sujets lourds et douloureux.
Le mot de la fin
La Bibliothèque Morisaki est un roman court, un peu plus de 200 pages, mais il laissera en moi une empreinte durable. Il nous rappelle que les livres peuvent être des refuges, ils l’ont d’ailleurs toujours été pour moi. C’est une lecture idéale pour les amoureux des mots, les cœurs un peu chagrinés, et ceux qui croient encore en la douceur des choses simples
Citation
« Je veux que tu me fasses une promesse, Takako. Promets-moi de ne pas avoir peur d’aimer. Aime les autres, autant que tu peux. Même si l’amour va parfois de pair avec la tristesse, une vie passée sans aimer est une vie morne. Je n’ai pas envie que tu arrêtes d’aimer à cause de ce qui s’est produit. Aimer, c’est merveilleux. Ne l’oublie pas. Le souvenir d’avoir aimé quelqu’un ne s’effacera jamais de ta mémoire, et il réchauffera ton cœur pour toujours. C’est une chose que l’on comprend en prenant de l’âge, comme moi. Alors, tu peux me le promettre?«